CHERCHER UN ARTICLE
FRANÇAIS I ENGLISH
Fermer
NOM
PRENOM
EMAIL
EXPO
Claude Cahun

L'énigme de l'être : L'exposition de Claude Cahun au Jeu de Paume

■ LIRE AUSSI
EXPO Iris van Herpen Sculpting the Senses
SEDUCTIVE Glamorous World
FASHION WEEK Franck Sorbier Haute-Couture Ete 2014
EXPO Robert Wilson Vidéo portraits of Lady Gaga
FASHION CLOSE UP Coco Rocha Interview

Paris, capitale des âmes troublées et des rêves inassouvis, accueille dans les entrailles du Jeu de Paume une exposition où l'ombre et la lumière se croisent, où l'identité vacille et se réinvente. Ici, dans ces salles où résonne encore l'écho des siècles passés, s’élève la voix silencieuse d’une figure mystérieuse et insaisissable : Claude Cahun. Poétesse, écrivaine, photographe, mais aussi pionnière féministe, Claude Cahun incarne une multiplicité créative, une artiste totale. Un nom qui résonne comme une énigme, une signature cryptée gravée sur les rives de l’avant-garde. À travers ses autoportraits où le masculin et le féminin s'effacent, se confondent, renaissent dans une nouvelle harmonie, Claude Cahun interroge non seulement l'art, mais l'essence même de l'être, et par-dessus tout, la liberté d’expression et des mœurs.

Née sous le nom de Lucy Schwob, Claude Cahun, telle une sphinge moderne, défie toutes les conventions. Comment saisir cette âme insaisissable, dont l’œuvre littéraire et photographique n’est autre qu’un miroir brisé où chaque fragment reflète un visage différent ? Ce n’est plus une simple artiste que nous contemplons, mais une créature de rêves et de métamorphoses, façonnée par les tempêtes du surréalisme, par la houle des doutes existentiels. Une lutte permanente contre les étiquettes, contre les murs étroits du genre, de la norme sociale et de l’identité. Son œuvre résonne comme un plaidoyer audacieux pour la liberté individuelle, une révolte contre les conventions restrictives qui enchaînent les esprits.

L’exposition au Jeu de Paume est une plongée dans ce vertige de l’intime, où chaque image de Cahun devient un cri muet, une question lancée à l’infini. Devant ces autoportraits, nous sommes face à un être qui, à chaque instant, détruit l’ancien pour faire surgir une nouvelle vérité. L'ambiguïté est son royaume, l'inconnu son domaine. Comme si l’artiste disait : "Je suis tout et je ne suis rien." Elle est l’homme, elle est la femme, elle est l’ombre qui danse sur les murs de la conscience, un spectre en quête d'une liberté absolue, qui refuse toute entrave, tant personnelle que sociétale.

L'influence des grands esprits du surréalisme, notamment André Breton, se fait sentir dans ces images hantées. Mais Claude Cahun ne suit pas, elle dévie, elle forge sa propre voie dans la pierre brute de la révolte. Tel un esprit en lutte contre les éléments de la société, contre les tempêtes de la norme, elle affirme un "moi" qui échappe à toute définition. Ses photographies sont des poèmes visuels, des versets silencieux où le regard plonge et se perd, tandis que ses écrits résonnent comme des manifestes intimes pour la liberté des mœurs et la libération des carcans imposés par la morale conservatrice.

Dans ces autoportraits, le masque devient une arme et le costume une déclaration. Claude Cahun endosse mille visages pour mieux s'effacer, pour mieux nous dire que l'identité est une illusion, une scène où chacun, à tour de rôle, devient acteur et spectateur. Chaque cliché est un drame intime, une scène où l’artiste questionne, non sans une certaine mélancolie, la nature même de l'existence.

L'exposition nous emmène ainsi dans une traversée à travers le temps, dans cette période de l'entre-deux-guerres où l'Europe est déchirée, où l'individu est en quête d’un sens nouveau. Cahun et sa compagne, Marcel Moore, elles-mêmes engagées dans la résistance, deviennent des figures non seulement artistiques mais politiques, des guerrières de l'esprit contre l'oppression fasciste. Dans cet engagement, l'art devient non plus seulement un miroir mais une arme, une arme de liberté.

Et dans les salles silencieuses du Jeu de Paume, nous sommes invités à nous perdre dans cette œuvre qui questionne le regard que l’on porte sur soi et sur l’autre. Claude Cahun, en véritable alchimiste de l’âme, transforme l’autoportrait en une expérience universelle. Face à ces œuvres, une voix, celle de l’éternité, semble murmurer : "Qui es-tu ? Qui sommes-nous ?" Comme un phare dans la nuit, éclairant les ombres des doutes et des certitudes.

Ainsi, l’exposition de Claude Cahun au Jeu de Paume n’est pas seulement une rétrospective, elle est un voyage dans les confins de l’âme humaine, une plongée dans cet abîme où chaque individu lutte contre les masques du monde pour dévoiler, peut-être, une vérité plus grande. Une vérité qui, comme la mer, échappe toujours, mais qui, dans chaque reflet, révèle une part de nous-mêmes.

Dans ce sanctuaire parisien, Claude Cahun résonne comme un cri que ni le temps, ni les murs, ni les conventions ne peuvent étouffer. Elle nous rappelle que l’art, sous toutes ses formes, n’est pas une simple contemplation, mais une révolte, une quête éternelle de l’infini dans la finitude de l’existence. Une quête inlassable pour la liberté d'expression et la liberté des mœurs, qui font écho aujourd'hui encore, comme une leçon de courage face à l’oppression des esprits.



PHOTOS

Claude Cahun, Autoportrait, 1929
Tirage gélatino-argentique
Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris
© Musée d’Art Moderne de la Ville de
Paris / Parisienne de Photographie



VIDEO

Claude Cahun
Jeu de Paume Paris



INFOS

Jeu de Paume
1, place de la Concorde
75008 Paris

Commissaires : Juan Vicente Aliaga et François Leperlier



www.jeudepaume.org